Présentation du SEL des deux rives

Texte de Danielle, lu par Mireille :

Petite histoire du S.E.L de Romans.

Les 1ers SEL ont vu le jour en France dans les années 90. A Romans, c’est un jeune Lyonnais, Romain, venu s’installer ici qui a importé l’idée et l’expérience.
Travaillant alors à la Maison de la Nature et de l’Environnement, il croise des personnes, des groupes de gens ou associations qui sont bien dans la mouvance des SEL. Idées d’alternatives à la consommation, à l’économie, solidarité, entraide, liens , valorisation des compétences de chacun…

Le projet prend forme et avec les 1ers adhérents, l’association débute sur un mode très participatif : Chacun met la main à la pâte pour rédiger, imprimer et diffuser les outils du SEL : Annuaire (une centaine d’adhérents dès la 1ère année), un catalogue d’offres et de demandes, un petit journal : Le Girofle, tout cela en format papier et diffusé tous les mois.
Sans oublier le chéquier à souches pour comptabiliser les échanges.

Le SEL vit d’abord par les rencontres entre adhérents : Réunions mensuelles où tous participent : c’est l’occasion de faire avancer l’association, il y a une double présidence mais avec une volonté de démocratie participative ; Occasion de discussions, débats sur les sujets liés à la valeur de l’argent, à celle de la monnaie virtuelle, occasion de faire part des besoins des uns et des autres en matière d’offres et demandes, de faire des échanges de biens et bien sûr de partager un moment convivial autour de plats et boissons tirés du sac.

Les adhérents des débuts se connaissent tous et constituent des groupes d’amis dont les échanges finissent par ne plus se comptabiliser via le SEL.

D’autres projets prennent vie (Notamment le café participatif la Boucherie Chevaline) emportant avec eux une partie des « forces vives » du 1er SEL.
Par ailleurs des divergences de vues et incompatibilités de personnalités comme il en existe partout, entraînent l’abandon au fil des mois de la plus part des adhérents.

Le SEL de Romans manque de s’éteindre dans les années 2004/2005.
Il repart pourtant avec de nouvelles volontés de maintenir cette belle idée. Ainsi avec une poignée de personnes (15), d’anciens qui se sont accrochés et de nouveaux plein d’idées, le sel poursuit sa route.
Avec une nouvelle présidence (Marie -France) c’est l’époque d’un bel élan, d’un nouveau dynamisme de beaucoup d’énergie:avec des innovations :
Le Sel se fait mieux connaître des Romanais (et environs) par des actions visibles :
– Ouverture pendant un mois de décembre d’un magasin de la gratuité : « Le bon marché »,
– Foire aux savoir-faire sur les quais de l’Isère, piques-niques sur des places de la ville,
– Participation aux projets citoyens récompensés par la municipalité de l’époque,
– Participation aux actions de la MNE : Fête de la nature, exposition pendant la semaine du développement durable, participation à la 1ère « faites de la Récup’ de la Ressourcerie verte,
Articles dans les journaux locaux, émissions de radio locales, présence aux forums des associations, finissent de faire suffisamment connaître le SEL pour le faire vivre d’un nombre croissant d’adhérents et une multiplication des échanges. (jusqu’à dépasser les 200 adhérents)

Le SEL entre alors avec l’aide de Mireille, dans l’aire de l’informatique : Création d’un site WEB, partage des infos essentielles par internet : Annuaires et catalogues, annonces des manifestations etc.
La comptabilité des échanges et de la circulation de la monnaie virtuelle : le Clou est laissée au soin et à la conscience de chacun.
Depuis plus de 10 ans notre SEL fonctionne ainsi. Misant sur la confiance et l’éthique,
l’essentiel étant que les échanges se fassent en bonne entente et que chacun y trouve son compte.

Texte de Romain créateur du SEL du SEL Romans :

L’origine du SEL de Romans et ses environs remonte aux pentes de la Croix-Rousse, à Lyon !
Ayant été adhérent à Lyon, aux alentours de 95-96, j’avais trouvé l’idée excellente, pertinente, avec des valeurs qui collaient bien à mes aspirations du moments.
Lors de ma migration dans la Drôme, j’ai eu l’envie de semer les graines de ce concept, et s’est rapidement, début 97, que le projet a éclos.
Travaillant à la M.N.E.de Romans, je voyais « graviter » des personnes, des énergies qui étaient dans la même dynamique, dans la même optique.
Rapidement, les premières réunions se sont programmées, l’assemblée générale s’est constituée, et sans avoir rien vu venir, je me suis retrouvé président, alors que je n’aspirais pas du tout à ce poste !!
On bénéficiait de la nouveauté, de l’actualité du moment, avec le procès du 1er SeL de France, en Ariège, créé en 1994, de l’énergie d’autres associations, MNE, Ferme de Cocagne, Maisons de quartiers, etc.

C’était l’époque où l’ordinateur prenait de plus en plus de place, mais où l’on faisait quasiment tout à la main !
Je me souviens des premières feuilles du Girofle, illustrée à la main par Sarah, du catalogue à photocopier en 100 exemplaires, les envois, etc. C’était artisanal et tout le monde mettait la main à la pâte, avec comme il se doit la présence des plats et boissons que nous partagions.
Je trouvais qu’il y a avait une belle dynamique, les rôles étaient partagés, on expérimentait des formes de « démocratie », on comptabilisait tout les échanges avec le fameux « chéquier » à clous (carnet à souches en trois parties). Sarah pour des marchés avait même apporté des vrais clous pour matérialiser les échanges !!!
On parlait pas mal du rôle de l’argent, de la consommation, de son rapport aux échanges, etc. Au départ on avait du mal à se défaire du modéle capitaliste (chéquier, équivalence clous/francs/euros), et puis on a commencer par se dire que 60 clous équivalait 60 minutes, pour le même service, que tu fasses du jardinage, du repassage ou du bricolage…

Ce qu’il y avait de formidable, c’est qu’au final, plus que de s’échanger une confiture faite maison, des BD, du vin de sureau, etc. c’était la richesse de rencontrer des personnes avec toutes leurs qualités (et leurs défauts !) et de créer un réel réseau qui au final voyait les échanges se faire mais de manière « officieuse », comme entre amis ! On ne se demande pas de clous entre amis.
C’est à dire qu’une bonne partie des membres se côtoyaient aussi en dehors du SeL, il existait une réelle fraternité, solidarité, qui dépassaient le cadre strict de l’association.
La satisfaction était aussi de pouvoir répondre aux personnes qui venaient s’inscrire, mais qui n’avaient pas d’idées pour remplir le catalogue, qu’elles avaient forcément une compétence à offrir ! Et petit à petit, la confiance en soi, le dépassement de la peur de l’autre, la bienveillance, la confiance, autant ingrédients qui prenaient ensemble pour mijoter de belles rencontres.
Didier, Lucie, Louisa, Lyse, Sarah, Jean-Pierre, Michel, Odile, et tous les autres.
La première année, il y avait plus de 100 adhérents ! On avait expérimenté une présidence à double têtes, pour éviter qu’un ou une présidente s’encroûte dans la fonction, il y avait des commissions qui permettaient « l’animation » de toute l’association.
Il y avait aussi les rencontres, une fois par mois (?), les permanences (une fois par semaine), les CA…
On a eu aussi des déboires avec le bureau de la MNE, qui voyait dans le SeL, une sorte de contre pouvoir avec la mairie… (alors qu’il n’en était rien !).
On a eu aussi les critiques de favoriser le travail au noir et donc non déclaré…
On a eu aussi des institutions (ANPE, CAF…) qui demandaient notre témoignage, notre expérience pour « développer » des groupes de personnes pour qu’elles « sortent » de la misère… (sic), démontrant l’incompréhension du fonctionnement des SeL.
Il me semble que beaucoup de projets gravitaient autour du SeL, car une majorité des adhérents étaient impliquées dans d’autres associations, d’autres dynamiques.

Et puis il y a eu le projet de la Boucherie Chevaline, j’ai délaissé le SeL, pour m’investir dans la création du projet, avec Didier. C’est d’ailleurs lors d’une réunion/rencontre/soirée festive du SeL que la boutade, de créer un lieu ouvert le soir sur Romans, est partie !
Mon regret est de ne pas avoir fait « une passation en douceur » entre les 2 associations. Avec le temps, mon ressenti est d’avoir emmener une certaine énergie qui a manqué au SeL pour continuer sereinement…mais j’ai été rassuré quand le SeL 2.0, nouvelle version a pu renaitre !
L’autre regret est de ne pas avoir pû développer plus de liens entres d’autres associations pour grandir en échanges. Il y en a eu un peu avec la Boucherie pour l’achat des boissons en clous.

Ce fût un plaisir, un sentiment de fierté que d’avoir participer à cette grande aventure, cette épopée, et d’avoir pu vivre et faire vivre des rencontres riches en humanité et solidarité.
20 ans, quel bel âge !

C’est avec plaisir que je re-écoute les 20 ans chantés par Léo Ferré !